Les Pézans de chez moué...

Ils se lèvent au matin, par une brume insolente,
Se prennent par la main et chaussent leur méfiance,
Et se gardent déjà de ne pas trop parler,
Ils ne disent pas grand chose, les pézans de chez moué.
Ils regardent sans rien dire, la cendre encore fumante
De la vieille cuisinière, qui leur vient de la tante,
Ne connaissent pas le froid, ne savent pas frissonner,
Ne savent pas trembler, les pézans de chez moué.

Ils gardent le secret qu'leur a donné leur père,
Et qui vient du grand père ou de l'arrière grand-mère
Enfin ils ne savent plus très bien,
De qui ni d'où il vient.

Leurs yeux ont la couleur de leur terre jaunissante,
Ils ont les dents éparses et les mains rougissantes,
Ne sont jamais fiévreux, ne se font pas soigner,
Sont jamais fatigués, les pézans de chez moué.
Ils pensent de temps en temps à leur femme vaillante,
Se surprennent à maudire une pluie trop gènante,
N'ont jamais voyagé, ne savent pas s'évader,
Ne savent même pas rêver, les pézans de chez moué.

Ils travaillent la terre, qu'leur a donné leur père,
Et qui vient du grand-père ou de l'arrière grand-mère,
Enfin, ils n'savent même plus très bien,
De qui ni d'où elle vient.

Et puis sentant venir la mort frémissante,
Ils embrasse la croix, le Christ et se repentent,
Mais gardent en secret l'argent qu'ils ont caché,
Ne savent pas donner les pézans de chez moué.
Ils s'en vont un matin, par une brume insolente,
Se prennent par la main et chaussent leur méfiance,
De peur que l'on surprenne leurs dernières pensées,
Ne savent pas aimer, les pézans de chez moué.

Ils retournent à la terre où les attend leur père,
Qu'avait rejoint l'grand-père tout près de l'arrière grand-mère,
Enfin, ils ne savent plus très bien,
Qui vraiment les attends..........

Michel BENOIT

Comments

[jean-no]

De beaux accents de Gaston Couté. Bravo !