Canalblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
Publicité
Le Blog de Michel Benoit
Archives
Le Blog de Michel Benoit
28 décembre 2013

La Bague de Mina de Daniel Goldenberg

Photo

Je viens de terminer le dernier livre de mon cousin et ami Daniel Goldenberg qui est édité chez Eolienne. Un sacré roman Daniel ! S'il fallait lire absolument un roman en ce début d'année 2014, c'est bien celui-ci qu'il faudrait dévorer.

La Bague de Mina, c'est le titre, nous décrit avec une acuité rare l’inéluctable déchéance (par le « toboggan » social) d’un homme, dont il ne reste plus d’espoir qu’à travers la mémoire de sa famille, un projet délirant et l’existence de sa fille, qui est à sa recherche.

En voici un extrait:

J’aurais pu, moi, lui raconter une authentique histoire de baleines. C’était du temps de ma splendeur. J’allais à bord d’une luxueuse voiture de Los Angeles à San Francisco par la côte. C’est le Cap Corse multiplié par cent. Au tournant de la route, à flanc de colline, s’accroche un motel, bar, café et observatoire des baleines. Je bois un expresso. Je le paie au barman mexicain quand un homme, le patron visiblement, s’approche de moi. On devise. Il me demande d’où je viens. On échange quelques lieux communs sur Paris. Il a un petit accent qui dénote qu’il n’est pas américain. À mon tour, je lui demande d'où il vient.— D’Israël… me répond-il, puis il englobe d’un geste large le paysage qui nous entoure, y compris l’Océan.
— Tout ça c’est à moi !
— Et dans ce désert, est-ce qu’il y a assez de Juifs pour faire un miniam ? lui demandai-je
— Non.
J’ai fait alors une tentative pour savoir si les Israéliens ont autant d’humour que les autres juifs.
— Oh, je lui dis, neuf baleines et un juif ça peut faire un miniam, nouh ?
Sa réaction n’a pas été immédiate, ses grands yeux bleus m’ont scruté puis il a éclaté de rire, par petites saccades de plus en plus sonores. Depuis ce temps-là, je crois qu’il y a encore quelques Juifs en Israël…
À part cette ribambelle de gros livres sur les grands mammifères marins, ses étagères croulaient sous des d’albums photos. Je les ai regardés. La plupart la montraient sur une plage en train de se rôtir. Une nuit, rentrant de son tapin, elle m’a surpris en train de les feuilleter. C’étaient ses photos de vacances.
— Moi, mes vacances, a-t-elle commenté, je me les paie là où ça coûte le plus cher. Et dans tous ces endroits chicosses et friqués, on me balance des Madame par-ci, des Madame-est-contente. Et quelquefois, j’ai envie de leur dire tout haut : « Je suis qu’une pute, je dépense le fric des michetons et, excuse mon écart de langage, je vous pisse à la raie !

goldenberg

Suzon-Maïté ne manquait pas de caractère. Le 7E jour de la semaine de bonté : salut bonsoir. Elle m’a mis dehors. Avec gentillesse et quelques considérations en forme de conseils pour l’avenir.
— J’ai rien contre toi, mais tu vois la cohabitation avec un mec, c’était plus mon truc parce que tous ceux qui me niquent font écran. Et si je te garde au chaud comme la poule son oeuf, eh pas drôle ça ? Eh ben tut’en sortiras jamais de la cloche alors qu’à mon avis t’as la classe et une tête pour le faire.
Ce qui m’a le plus touché dans cette relation, c’est qu’elle ne m’a jamais demandé comment je m’étais retrouvé dans la débine. La délicatesse est innée.
— Oublie pas, Julot, t’as une tête à t’en sortir.
Elle m’a dit cela quand je prenais racine sur son paillasson pour lui dire au revoir. Et là, elle m’a vraiment surpris. Suzon-Maïté m’a pris par le cou et m’a voracement embrassé, bouche ouverte, à couper le souffle ! Une seconde après, cette fille de la nuit m’a claqué la porte au nez.
Remonte ! Remonte ! J’avais donc une tête à m’en sortir ? Et si elle disait vrai ? Est-ce que j’étais sur le point de ne plus être un schlimazel ? […]

Daniel Goldenberg est né à Ménilmontant, en 1931; cachée pendant la guerre, sa famille réussit à échapper à la Shoah... Élève au Centre Dramatique de la rue Blanche, il devient acteur dans plusieurs
pièces dont « Les Oiseaux de Lune » de Marcel Aymé, puis bifurque et devient réalisateur de, notamment, « Le retour » (1959, seul film traitant de la Guerre d’Algérie, tourné en son temps) et
« Le Portrait de Marianne » (1970), interprété par Claude Brasseur, Bernard Fresson et Karten Blanguernon. Sur la paille et ruiné, le sort fait de lui un scénariste et un écrivain. Son livre Papa Poule
devient une série télévisée culte. Le Triporteur de Belleville (avec Lorànt Deutsch) et Le Zaïdé sont adaptés pour France 2 (par Stéphane Kurc). Le Grand Rôle passe au cinéma. Daniel Goldenberg
adapte son roman au théâtre pour Michel Jonasz. Enfin vient La Fugitive, opéra en 3 actes, représenté à l’Opéra de Rome…

Editions Eolienne

Contact :

Xavier Dandoy de Casabianca
xddc@orange.fr
www.editionseoliennes.fr
9, descente des Chartreux
20200 Bastia
04 95 31 74 66
06 20 62 37 83

 

Publicité
Commentaires
Le Blog de Michel Benoit
Publicité
Publicité
Publicité