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Le Blog de Michel Benoit
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23 septembre 2012

Robespierre, la probité révoltante.

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Claude Mazauric, l'un de mes maîtres en histoire de la révolution française a publié ce jour un billet dans le journal l'Humanité à propos du livre de Cécile Obligi édité chez Belin.

Écrite simplement mais avec fermeté et beaucoup de probité sereine, voici une brève et juste biographie de Maximilien Robespierre qui trouvera son public parmi celles et ceux qui n’aiment pas qu’on leur dicte ce qu’ils devraient nécessairement penser. Il ne se passe guère d’années sans que le personnage central de la Révolution française ne fasse l’objet d’un ouvrage consacré à sa vie et à son action. Mais le plus souvent, ce qu’on écrit de Robespierre est à charge : homme de sang, unique protagoniste, la dernière année de sa vie, d’une Terreur injustifiée et injustifiable, doctrinaire impitoyable agissant aux limites de la psychose… On salit sa mémoire, quoique personne, cependant, ne puisse se permettre de méconnaître l’importance historique du personnage.

Encore récemment, le maire de Paris s’est opposé à ce que l’on donne son nom à un espace public de la capitale : c’est dire si la pression idéologique des antirobespierristes demeure forte ! Malgré la bataille conduite depuis Jean Jaurès et ceux qui l’ont suivi, d’abord par Albert Mathiez puis par la Société des études robespierristes (reconnue d’utilité publique), qui a édité (et réédité deux fois, en 2000 et 2007) les onze volumes de ses œuvres complètes, rien n’y a fait : l’esprit de capitulation devant les dénonciations assassines des thermidoriens, qui ont mis à mort Maximilien Robespierre et ses compagnons à la fin de juillet 1794, s’impose toujours avec la même impudeur.

On voudrait simplement rappeler que la République française n’aurait jamais été ce qu’elle devînt (ou redevient, espérons-le) si Robespierre n’y avait imprimé originellement sa marque : Mme Parisot, la patronne du Medef, elle, ne s’y est implicitement pas trompée, comme on a pu le remarquer au cours de la dernière campagne électorale !

En intégrant dans son récit de remarquables extraits significatifs de ses discours, resitués avec clarté dans le contexte précis de leur élocution, Cécile Obligi rend intelligible l’évolution de la pensée et de l’action politique de Robespierre. Elle en montre la continuité du point de vue des principes qui l’inspirent, mais souligne aussi leur renouvellement pratique dans un contexte de crise nationale et au milieu des tensions multiples qui reflètent la complexité de la crise révolutionnaire, coloniale et européenne de 1789 à 1794. Elle sait aussi mettre en évidence le regard souvent distancié que Robespierre porte sur l’actualité immédiate, en n’oubliant jamais de tenir simultanément le discours de l’Universel.

Conservatrice à la Bibliothèque nationale de France, l’auteure fait montre d’une grande maîtrise dans la présentation des séquences étudiées et des hypothèses formulées, ce qui rend très attachante la lecture de son livre. On regrettera peut-être qu’elle ait accordé moins d’importance aux sources philosophiques et idéologiques de la formation de l’Incorruptible, notamment s’agissant de Montesquieu et, surtout, de Rousseau, auxquels il se montra fidèle tout en sachant innover sans les trahir, car ce sont là des questions qui sont au cœur des travaux actuels des chercheurs.

Mais cela n’entache pas la qualité d’un livre très utile et bien écrit sur le premier grand homme d’État républicain que rien, ni l’origine ni le tempérament, ne prédisposait à devenir ce qu’il fut, quand la Révolution s’empara de la France en 1789.

Robespierre. La probité révoltante,  de Cécile Obligi. Éditions Belin, 2012, 152 pages, 20 euros.

 

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