Loïc la flibuste

Si vous traversez le village de Berfay, petit bourg de 380 habitants, situé sur la petite route en direction de la Ferté Bernard, arrêtez vous sur la place de l'église, vous pouvez vous y garer sans difficultés, ici pas de parcmètres ni de zone bleue, juste une boulangerie aux néons aguicheurs et un café restaurant épicerie dont le seul nom est évocateur pour ceux qui ont la curiosité de faire une halte ou de se dépanner en paquet de café moulu ou autre nécessité indispensable de dernière minute.

D'entrée de jeu le ton est mis ! Tout y rappelle la mer, les corsaires du XVII° siècle et les grands voyageurs qui sillonnèrent les océans sur leurs voiliers tous plus magnifiques les uns que les autres. Le Flibustier de l'étape est un petit homme qui vous accueille sur le perron de son commerce, le seul à dix kilomètres à la ronde, avec bonhomie. Loïc Le breton, est venu s'échouer il y a quelques  treize ans sur cet archipel déserté, parti de la capitale pour y chercher l'aventure, après un raz le bol que l'on peut facilement comprendre pour cet amoureux des grands espaces. Ici les mouettes sont en cire et les filets pendent au plafonnier du bistro qu'il a décoré à son goût. Loïc est généreux, il fait partager aux clients et aux visiteurs de passage ses passions, celles des galions espagnols mais aussi celles de la peinture et ses oeuvres recouvrent généreusement les murs de la boutique. Car Loïc peint aussi, sur toile, sur bois, sur de l'ardoise, sur des tuiles, il peint sa Bretagne natale et entre deux verres de coteaux du Val de Loire, raconte à qui veux bien l'entendre, ces fameuses histoires de marins, celles qui font rêver un instant, le temps d'un ballon de blanc ou de rouge au choix.

-- Quand tu les choisis toi-même je perds tout le temps ! S'exclame un habitué en grattant sans conviction un Black Jack tout en redemandant un Ricard.

Ici, on y vient pour Loïc, pour ses histoires, pour le décors, pour la convivialité qui s'y dégage, autre vestige du temps jadis, car Loîc a su imposer celle-ci, emmenée dans ses bagages de la butte montmartre, où il avait sévi à La Crémaillère. Un autre temps, une autre époque, se plaît-il à répéter.

--Je te le disais bien que c'était pas encore mon jour ! Répète inlassablement le client accoudé au comptoir tout en regardant son verre à moitié vide ( il est à moitié plein uniquement lorsqu'il gagne..)

Nous parlons de la mer, de Paname, de la butte, de la dernière toile qu'il vient d'achever sur commande. La nuit tombe, je sais que pour moi, cette nuit me rapprochera d'une autre aventure, d'un long voyage vers un autre bonheur... Loïc, de son index, lisse sa fine moustache et me dit à bientôt. A loin j'apperçois les feux d'un véhicule se rapprochant du bourg... La nuit ne fait que commencer....

Michel Benoit

Comments

[Daniel A.]

Inutile donc de te demander si le WE a été bon... Encore un de ses personnages dont tu as le secret et quelque chose me dit qu'on le croisera de nouveau dans quelques temps...

[jno]

J'aime ces récits de bourlingue, les tiens, ceux des amis de rencontres...