LES SOUTERRAINES DE PASCAL TEDES

Durant deux heures et demi de spectacle entrecoupé de dix minutes d'entracte, Pascal Tedes nous entraine dans un imaginaire étoilé où les nuages ne sont que des morceaux de tissus que les Dieux ont semé au cours du temps pour retrouver leurs routes. Ce fameux photographe de guerre qu'il incarne est plus vivant qu'on ne le pense et les images, celles  prisent tout au long d'une carrière peuplée de morts et de désastres sur notre bonne vieille terre qui s'entretue chaque jour. Désabusé pour avoir couvert une actualité chaque jour renouvelée par le choc des photos toujours plus racoleuses, il sait qu'il rejoindra ses modèles tous décédés dans des circonstances tragiques pour les accompagner encore et toujours dans une éternité où chacun jouera le rôle qu'il leur aura choisi. Vingt ans à prendre en cliché de célèbres inconnus qui n'ont pour seul point  commun d'avoir marqué la pupille et l'objectif, ça vous interpelle obligatoirement un moment ou à un autre. Qui sont-ils ? Ces êtres décharnés, torturés, tout baignant de leur sang, qui étaient-ils vraiment ? Avaient-ils une famille, des amis, une maison... ? Tous se retrouvent dans cette maison aux volets de deuil avant de franchir la rivière qui les séparera du monde des vivants à celui des morts.
Pascal Tedes, omniprésent, incarne ce photographe torturé avec une grande subtilité. Il offre un rôle magnifique à son fils Roman Tedeschi, extraordinaire de vérité dans le rôle de Vladen, le tortionnaire qui n'échappera pas lui aussi au grand célestage. Nathalie Jadot est parfaite dans ce rôle d'actrice en perdition, libérée d'un seul coup d'une concurrence plus jeune et choisissant enfin ses rôles à sa mesure.
Notons le beau rôle de composition de Philippe Dufour qui nous montre tout son talent dans un rôle de composition avant la grande décomposition.
Soulignons particulièrement l'excellent travail de Pierre Otznberger à la régie, lumière et son.
Un grand moment de théâtre, une pièce  importante dans le répertoire de Pascal Tedes, qui annonce certainement une transition dans l'écriture et la mise en scène. Confirmation à venir dans un an avec la prochaine création du Carambole Théâtre qui nous donne rendez-vous en septembre 2010.